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Lettre d’un enseignant à la ministre de l’éducation

Après la lecture de cette superbe lettre, votre devoir serait de la transférer à tous les enseignants(es), le personnel de soutien, les parents et les amis(es) que vous avez.
Cette lettre a été écrite par Luc Gagnon, enseignant au secondaire, Chandler.

Lettre à la ministre Courchesne, ven, à 17:48

Madame Courchesne,

Vous nous invitez à nous prononcer sur un projet de règlement qui modifierait le calendrier scolaire pour en faire le calcul en heures plutôt qu’en jours. Selon vous, ces changements permettraient la tenue d’activités scolaires la fin de semaine. Est-il possible madame que vous soyez si loin de notre réalité ?

Je suis enseignant au secondaire et suis en année sabbatique. J’avais grand besoin de cette année pour me refaire une santé. Je n’ai pourtant aucune maladie chronique, aucun syndrome ou quoi que ce soit d’autre. Non, je viens tout simplement de terminer une quatorzième année à titre d’enseignant au secondaire. Tout simplement. De l’épuisement professionnel ? Je n’ai aucun diagnostique à vous offrir. Seulement 14 années au service de votre Ministère.

Je n’ai jamais compris la façon de fonctionner de mon employeur. Vous avez gentiment déguisé les bulletins des élèves en y remettant des notes. Ce faisant, vous avez obligé tout votre personnel enseignant à expliquer une deuxième fois en quelques années que les notes qu’ils voyaient sur les bulletins n’avaient rien à voir avec les notes qu’ils retrouvaient sur les leurs alors qu’ils étaient étudiants. Évidemment !

Nous enseignons et évaluons des compétences et non des connaissances comme c’était le cas à l’époque. Vous étiez au courant dites ? Juste au cas où ça ne serait pas arrivé jusqu’à vos oreilles, les parents ne sont pas plus satisfaits de cette version des bulletins. Il va de soi par contre que ce sont vos enseignants qui encaissent les reproches. Après tout, nous sommes les premiers répondants du système d’éducation. C’est nous aussi qui ramassons parfois à la petite cuillère des enfants qui vivent des choses difficiles, des parents aussi.

Dites, je dois comptabiliser en minutes ou en heures les appels que je fais ou que je reçois en dehors de mes heures régulières de travail quand un parent inquiet me contacte ? Comme ballon d’essai, votre proposition est excellente ! Vous nous proposez donc de calculer notre tâche en heures. C’est que des heures nous en faisons déjà beaucoup vous savez. Seulement l’année dernière, j’en faisais en moyenne 60 par semaines. Est-ce que ces heures étaient comptabilisées sur une feuille de temps ou dans un registre ? Non. N’allez pas croire que je suis en train de me plaindre. Après tout, j’ai choisi ce métier et j’aime beaucoup mes élèves. Il est triste d’avouer par contre que c’est tout ce qui est au-dessus de mon école dans la hiérarchie du système d’éducation qui me répugne.

Je ne comprends pas que les commissaires d’une commission scolaire aient tant de pouvoir quand une infime partie de la population se donne la peine d’aller voter. Je ne comprends pas que le ministère ne me consulte pas quand vient le temps de faire des changements aux bulletins. C’est quand même moi qui les utilise. Je ne comprends pas que le ministère ne me consulte pas pour savoir quels changements nous pourrions apporter pour améliorer nos écoles. Nous sommes près des élèves, des parents et savons comment fonctionne une école. Ne pensez-vous pas que nous sommes les mieux placés pour vous conseiller ? Les activités pédagogiques les fins de semaines sont déjà chose courante. N’allez pas raconter le contraire à la population qui selon ce qu’on lit sur internet ou qu’on entend dans les médias ne veut rien savoir de votre proposition. Ces activités sont en partie compensées, mais jamais totalement, par un aménagement de nos tâches éducatives. Le reste est du pur bénévolat.

Hé bien oui. Votre personnel fait du bénévolat. Vous savez pourquoi ? Nous avons à coeur d’offrir ce qu’il y a de mieux à nos jeunes. Il y a une très grande dimension affective à l’enseignement vous savez. La proposition que vous faites aujourd’hui est encore une fois perçue comme une gifle au visage et n’aura que pour effet une démotivation du personnel. Pourquoi ? C’est pourtant évident. Les enseignants, les employés de soutien et les directions donnent tout ce qu’ils ont et encore une fois, on leur dit que ce n’est pas assez. Finalement, peut-être que la prochaine fois, je n’investirai pas dans une année sabbatique. Je remettrai peut-être tout simplement ma démission !
Merci de l’attention que vous porterez à ma réflexion. Peut-être ce courriel se rendra-t-il jusqu’à vous. Qui sait ? Vous n’êtes peut-être pas si loin. On peut rêver…

Luc Gagnon
Enseignant à la polyvalente Mgr Sévigny
Chandler, Québec

Voilà, j’ai fait mon devoir. Avant de partager cette lettre, je me suis posée la question si c’était une erreur que de la publier sur MON BLOG!?! Puis, je suis arrivée à la conclusion que je partageais les propos de M. Gagnon, tant comme parent, comme individu et comme employée. Qu’on y relate simplement une réalité qui est mienne, point.

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